Un quinquennat déjà

Kartier Nord, compte cinq années d’engagement à présent et quatre saisons d’expositions et de concerts; recul suffisant pour faire un bilan du chemin parcouru depuis 2009. Malgré cet engagement bénévole et citoyen dédié au site remarquable du Kaysersguet, force est de constater que convaincre les élus d’une idée même appliquée en actes, peut prendre du temps, voire excéder la durée d’un mandat. 
• Tout d’abord Le temps de faire prendre conscience à la ville de la valeur patrimoniale et environnementale de la villa Kayser et de son parc. Plus largement de sa situation au sein des institutions européennes et internationales, à proximité d’importantes structures culturelles (Maillon Wacken / Arte / St‘Art), d’une Citée Universitaires et du Centre Européen de la Jeunesse. 
• Ensuite le temps de faire comprendre que le mode de la création et de la recherche sont les meilleurs vecteurs de l’Europe de demain, de sa voie démocratique et assurément de son développement économique dans de nombreux domaines : technique, scientifique, environnemental, mais aussi sur le plan socio-anthropologique, géopolitique et culturel.  
• Enfin le temps de faire saisir que Le lieu dispose d’une ceinture verte exceptionnelle, allant du parcs de l’Orangerie au château de Pourtales (pourvu d’importantes œuvres d’art de commande publique) et, au-delà, à la forêt de la Robertsau, aux rives de l’Ill et aux plans d’eau aménagés le long du Rhin. Potentiel d’une grande richesse.

Pour mémoire nous rappellerons quelques jalons posés par l’association :
• Indication d’une voie internationale et culturelle pour le lieu avec proposition d’un projet plaçant le mode de la création, en ses diverses champs et qualités, au centre du propos.
• Lutte pour le maintien du site dans le domaine public et ouverture au public (pétition contre la volonté de la ville de céder le domaine pour une future ambassade). Dés lors changement de cap de la ville vers l’implantation du futur « lieu d’Europe » au Kaysersguet. 
• Constante disponibilité de Kartier Nord vis-à-vis des pouvoirs publics et des cabinets de consultants, non seulement pour offrir ses idées (constamment auditionnées), mais également par l’engagement d’un programme culturel dont les évènements furent régulièrement communiqués dans Strasbourg art contemporain, puis Versant Est, aux côtés des institutions muséales et des meilleures structures artistiques d’Alsace. 
• Sur quatre saisons consécutives, un commissariat d’expositions ayant permis de présenter dans la verrière du parc Henri-Louis Kayser une vingtaine de plasticiens contemporains et prés d’une soixantaine de musiciens, tous créateurs ou interprètes de haut niveau venus de divers horizons et cultures du monde. Ces évènements, construits sur la temporalité des weekends, furent proposés à titre gracieux à des publics croisés en constante augmentation (en moyenne entre 100 et 300 personnes par week-end). 

La participation de la ville se résumera à la gratuité d’usage d’une verrière rafraîchie à l’occasion, aux frais d’installation et de consommation électrique et à une aide financière s’élevant en moyenne à 600 € l’an sur cinq années d’action ; ceci pour souligner l’humilité de la demande.
Mais rien sans doute n’aurait pu se réaliser, sans la générosité des artistes, la participation des habitants de la Robertsau et des membres de l’association, mais aussi des publics venus nombreux témoigner leur attachement à Kartier Nord. Je citerais pour exemple la remarque d’une commerçante de la Robertsau, nous disant de façon si émouvante : « Je travaille sans relâche à fournir en pain le quartier, je n’ai par conséquent pas grande possibilité d’aller à des concerts ou au musée, ici c’est merveilleux car pour la première fois c’est la culture qui vient à moi. ».  

Quid à présent de la suite ? A l’heure où l’on disserte à tout va sur « comment démocratiser l’Europe, la culture et les savoirs », nous avons très envie de rappeler ici que nous avons expérimenté avec succès quelques idées et moyens à cet effet. Souhaitons que la ville et la direction du lieu d’Europe à présent nommée, sachent attraper la balle au bond ; sachent non seulement auditionner les associations, mais s’engager avec elles en la vie qualitative d’un projet partagé.

 « La culture, c’est la règle ; l’art, c’est l’exception » Jean-Luc Godard